Ci-dessous une séquence permettant de présenter de manière théorique et pratique 6 modes que l’on utilise souvent en musique.
Pour une version introductive et intuitive de cette notion voir Harmonie I, Chants du mode et Mode I
MODE : Théorie
– Dans Mode I, on a vu qu’en musique on utilise 12 notes mais que lorsque l’on crée une chanson/une circlesong/une co-improvisation, en n’en utilise en fait spontanément que 7 que l’on choisit parmi les 12.
– Cette association de 7 notes s’appelle un mode. Différents modes ne sont que différentes associations de 7 notes parmi les 12.
– On n’a vu que lorsque l’on a choisit une association de 7 notes parmi les 12, on ne parle plus de 7 notes mais de 7 degrés du mode choisit.
– On n’a enfin fait un petit exercice pour voir que choisir 7 notes parmi les 12 c’est simple : il suffit de choisir avec cette conscience que si chaque note est séparée de un demi-ton OU un ton ou un ton-et-demi l’une de l’autre, ça facilite la vie à notre oreille pour « se mettre dans le mode ».
– Jusqu’à présent nous nommions les 7 degrés d’un mode quel qu’il soit par les chiffres : 1, 2, 3, 4, 5, 6, 7.
– A partir de maintenant, nous allons complexifier un petit peu notre manière de les nommer afin d’être plus à même de faire la distinction d’un mode à un autre.
– Revenons à nos 12 notes de base et nommons-les ainsi :

Quand un chiffre est tout seul sans lettre, on dit que cette note est majeure. Si l’on voulait faire du zèle on mettrait un « M » à côté du chiffre pour bien faire comprendre qu’il s’agit d’une note majeure.
Quand un chiffre est accompagné d’un « m », on dit que cette note est mineure.
4aug est une exception. On aurait pu l’appeler 5m en toute logique, mais pour les 6 modes que nous nous apprêtons à voir nous choisissons de nommer cette note particulière 4aug qui signifié 4 augmenté (on augmente d’un demi-ton le 4). *cette note précise a d’autres noms dans d’autres contextes que nous verrons plus tard.
– Si nous devions rejouer au jeu de construction de mode, il s’agirait alors de nommer les 7 notes que l’on choisit par leur nom.
Par exemple, je pourrais construire un mode qui utilise les 7 notes suivantes : 1 2 3m 4 5 6m 7
J’ai bien 7 notes mais chaque note est cette fois nommée par l’association qui la définit par rapport aux autres.
Pour aller de 1 à 2 il s’agit d’un ton ; pour aller de 3m à 4 il s’agit d’un ton également, pour aller de 6m à 7 il s’agit d’un ton et demi, etc.
Le fait de nommer spécifiquement les 7 notes choisie par leur nom permet de savoir directement quel est le rapport d’une note à une autre.
Voici une image des 6 modes avec lesquels nous jouons beaucoup en musique :

On remarque que les notes équivalentes aux notes du piano sont en haut du tableau (les touches blanches et les touches noires).
APPRENDRE PAR CŒUR CES MODES
– Pour pouvoir improviser dans un mode particulier, il faut…connaître son mode ! C’est la première étape. Il va donc falloir apprendre à chanter et reconnaître les modes.
– Étape 1 : retenir de quelles notes sont composés les modes.
Le tableau est organisé pour que cela soit facile à retenir.
Tout part du mode « lydien » qui a le plus de notes majeures possibles.
Pour passer d’un mode à l’autre, il n’y a seulement qu’une seule note qui diverge par rapport au mode précédent. C’est la note qui est écrit en rouge.
Pour passer du mode « lydien » à « ionien », on prend le 4aug et on le transforme en 4.
Le principe du passage d’un mode à l’autre est que l’on « minorise » de plus en plus chaque mode pour arriver au mode « phrygien » qui est le mode qui a le plus de notes mineures et qui sonnent le plus « sombre ».
– Étape 2 : apprendre à chanter chaque mode à l’aide du piano
Il existe des applications de piano pour téléphone gratuites et il existe également le site virtualpiano avec un piano accessible gratuitement.
S’aider du piano pour retenir chaque mode.
Ma méthode : 10 min/jour pendant 7 jours et hop on connaît les 6 modes jusqu’à la fin de sa vie ! (si si, ça marche !)
– Étape 3 : apprendre à chanter chaque mode en partant d’une note au hasard sans d’aider du piano
Puisqu’en contexte de chant improvisé nous n’avons pas accès à un piano, il essentiel de pouvoir chanter les modes en partant d’une note au pif. S’entraîner à le faire !
* Si à ce stade de la lecture tu te dis « heu…mais comment ça je peux commencer par n’importe quelle note un mode ?! » je t’invite à revenir à l’article Mode I 😉
IMPROVISER AVEC UN MODE : Le principe d’une béquille
– Nous savons maintenant chanter 6 modes.
– Malheureusement, au début en tout cas, cela ne signifie pas à nous garantir que nous allons pouvoir improviser avec l’un ou l’autre de ces modes. L’oreille est coriace et nos habitudes reviennent vite au galop. Si par exemple j’ai l’habitude d’improviser spontanément en ionien, si je commence à improviser en lydien il est quasiment certain que mon oreille tombera très rapidement sur du ionien. Pourquoi ? Parce que lydien et ionien sont quasiment le même mode et ne diffèrent que d’une note. Or, si mon oreille est habituée à aller sur du ionien, nous avons beau connaître le lydien, cela n’est pas suffisant pour l’improvisation héhé.
– Nous avons donc besoin de béquilles pour nous lancer dans nos premières improvisations avec les modes. Lorsque l’on aura l’habitude d’improviser avec les modes ces béquilles pourront complètement disparaître.
– Il existe plein de manières de construire des béquilles pour improviser avec les modes.
Une première méthode serait de créer 3 boucles:
1/ Une boucle-fil qui chante 1 et 5
2/ Une boucle mélodique qui chante entre 1 et 5 uniquement
3/ Une boucle mélodique qui chante entre 5 et « 8 » (=1 à l’octave du haut)
Personnellement, j’aime tout de suite construire du « beau », des circlesongs sur lesquelles je m’épanouis musicalement. Les béquilles que je propose dans cet article sont donc des béquilles qui jouent à la fois leur rôle de béquilles et qui permettent aussi de construire une base harmonique solide et agréable pour mon improvisation.
IMPROVISER AVEC UN MODE : Utiliser les notes-clés du mode
– Je propose d’utiliser 2 béquilles qui reposent toutes les deux sur le même principe : utiliser les notes-clés du mode.
– Les notes-clés du mode sont les notes donc notre oreille a absolument besoin pour reconnaître le mode dans lequel je souhaite chanter.
– Les notes-clés pour chacun des 6 modes sont les mêmes : 1 ; 3 (majeur ou mineur suivant le mode dans lequel on est) ; 5 ; la note-pivot.
– Pourquoi ces notes ?
Le 1 parce qu’il est le degré-maison de notre mode : il est le degré autour duquel s’organise tous les autres.
Le 3 (majeur ou mineur) parce qu’il est le degré-directeur : il est le degré qui détermine si je suis dans un mode mineur ou un mode majeur.
*C’est l’occasion de le souligner : quand on parle de mode majeur, on nomme tout mode qui possède un degré n°3 majeur ; quand on parle de mode mineur, on nomme tout mode qui possède un degré n°3 mineur.
Le 5 parce qu’il est le degré-dominant : il est le degré qui rappelle le 1. C’est magique, quand notre oreille entend le degré n°5, elle a tout de suite envie de chanter le degré n°1 derrière.
La note-pivot parce que c’est le degré qui fait basculer notre oreille dans un mode unique : le 1, 3 (majeur ou mineur) et 5 sont des degrés qui sont partagés par plusieurs modes ; par contre la note-pivot est le degré qui n’appartient qu’à ce mode-là ou qui donne son identité au mode. Dans le tableau, il s’agit dans notes en rouge.
IMPROVISER AVEC UN MODE : Béquille n°1 = fil
– La béquille n°1 nécessite d’être au clair sur ce qu’est un fil.
– Le principe : créer un fil qui contient nécessairement mais pas forcément exclusivement les 4 notes-clés du mode.
– Règle de composition du fil : le degré n°1 doit être prépondérant = il doit revenir à de multiples reprises et être plus présent que les autres degrés
IMPROVISER AVEC UN MODE : Béquille n°2 = progression de 2 accords classiques
– La béquille n°1 nécessite d’être au clair sur ce qu’est un accord classique, un accord complexe et une progression d’accords classiques
– Le principe : construire une progression d’accords composées de 2 accords classiques qui contiennent nécessairement mais pas forcément exclusivement les 4 notes-clés du mode
– Règle de composition de la progression de 2 accords classiques :
A) Suivant le mode dans lequel on souhaite improvisé la progression est soit : accord de 1er degré + accord de 2e degré OU accord de 1er degré + accord de 7e degré.
Pourquoi obligatoirement ces 2 accords ? Parce que ce sont les plus simples à trouver à l’oreille et que dans le contexte d’une béquille on cherche à aller au plus simple !
B) L’accord de 1er degré doit durer plus longtemps que le 2e accord.
Ci-dessous un visuel de la progression à utiliser pour chaque mode :

IMPROVISER AVEC UN MODE : Utiliser les 2 béquilles
– Lorsque l’on commence improviser avec les modes, je recommande la recette suivante pour créer son improvisation : béquille n°1 + béquille n°2 + solo en comptant les 7 degrés du mode pour vérifier que c’est tout bon !
– A mesure que l’on progresse, il est possible de n’utiliser qu’une seule des deux béquilles et de compléter son arrangement de manière complètement intuitif
– Au bout d’un certain temps, plus besoin de béquille, la seule « volonté » de faire une improviser dans tel ou tel mode suffira à lancer notre oreille dans la bonne direction !
Sources : source multiples ; pédagogie Camille Pascal avec le tableau des 6 modes issu de la formation Mustradem et organisé visuellement par Nicolas Mahnich (merci de commenter si vous connaissez d’autres sources)
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Below is a sequence giving a theoretical and practical introduction to 6 modes often used in music.
For an introductory and intuitive version of this concept, see Harmony I, Mode songs and Mode I.
MODE: Theory
-In Mode I, we saw that 12 notes are used in music, but that when we create a song/circlesong/co-improvisation, we actually spontaneously use only 7 of the 12.
-This association of 7 notes is called a mode. Different modes are just different combinations of 7 notes from the 12.
-We’ve seen that when we choose an association of 7 notes from the 12, we’re no longer talking about 7 notes but 7 degrees of the chosen mode
-Finally, we did a little exercise to see that choosing 7 notes from the 12 is easy: all you have to do is choose with the awareness that if each note is separated by a semitone OR a tone or a tone-and-a-half from the other, it makes life easier for our ear to ‘get into the mode’.
-Until now, we’ve called the 7 degrees of any mode by numbers: 1, 2, 3, 4, 5, 6, 7.
-From now on, we’re going to make our way of naming them a little more complex so that we’re better able to distinguish one mode from another.
-Let’s go back to our 12 basic notes and name them as follows:

When a number stands alone without a letter, we say that the note is major. If we wanted to be over-zealous, we would put an ‘M’ next to the number to make it clear that it is a major note.
When a number is accompanied by an ‘m’, the note is said to be minor.
4aug is an exception. It could logically have been called 5m, but for the 6 modes we’re about to look at we’ve chosen to call this particular note 4aug, which means 4 augmented (the 4 is raised by a semitone). *This particular note has other names in other contexts, which we’ll see later.
If we were to play the mode-building game again, we’d have to name the 7 notes we choose by their names.
For example, I could build a mode using the following 7 notes: 1 2 3m 4 5 6m 7
I have 7 notes, but this time each note is named by the association that defines it in relation to the others.
Going from 1 to 2 is a tone, going from 3m to 4 is also a tone, going from 6m to 7 is a tone and a half, and so on.
By specifically naming the 7 notes, you can tell directly what the relationship is between one note and another.
Here’s an image of the 6 modes we play a lot with in music:

Note that the notes equivalent to piano notes are at the top of the chart (the white and black keys).
LEARNING THESE MODES BY HEART
To be able to improvise in a particular mode, you have to… know your mode! This is the first stage. So you’re going to have to learn to sing and recognise the modes.
Step 1: remember which notes make up the modes.
The chart is organised to make it easy to remember.
Everything starts with the ‘Lydian’ mode, which has as many major notes as possible.
To move from one mode to another, there is only one note that differs from the previous mode. This is the note written in red.
To go from the ‘Lydian’ mode to the ‘Ionian’ mode, we take the 4aug and transform it into a 4.
The principle of moving from one mode to another is that you ‘minorise’ each mode more and more until you reach the ‘Phrygian’ mode, which has the most minor notes and sounds the ‘darkest’.
Step 2: Learn to sing each mode using the piano
There are free piano applications for phones and the virtualpiano website has a free piano.
Use the piano to help you remember each mode.
My method: 10 minutes a day for 7 days and you’ll know all 6 modes for the rest of your life! (It does work!)
Step 3: Learn to sing each mode from a random note without the aid of a piano
Since we don’t have access to a piano in the context of improvised singing, it’s essential to be able to sing the modes starting from a random note. Practise it!
If at this stage you’re thinking ‘eh…but what do you mean I can start a mode from any note?!’, I suggest you go back to the Mode I article 😉
IMPROVISING WITH A MODE: The principle of a crutch
We now know how to sing 6 modes.
Unfortunately, at least at the beginning, this doesn’t mean that we’re guaranteed to be able to improvise with any of these modes. The ear is tough and our habits quickly come back to haunt us. For example, if I’m used to improvising spontaneously in Ionian, if I start improvising in Lydian it’s almost certain that my ear will very quickly pick up Ionian. Why is that? Because Lydian and Ionian are practically the same mode and differ by just one note. Now, if my ear is used to hearing Ionian, we may know Lydian, but that’s not enough for improvisation, hehe.
So we need crutches to get us started on our first improvisations with modes. Once we’re used to improvising with modes, these crutches will disappear completely.
There are lots of ways to build crutches for improvising with modes.
A first method would be to create 3 loops:
1/ A thread loop that sings 1 and 5
2/ A melodic loop that sings between 1 and 5 only
3/ A melodic loop that sings between 5 and ‘8’ (=1 to the top octave)
Personally, I like to build something ‘beautiful’ straight away, circlesongs on which I can blossom musically. The crutches I propose in this article are therefore crutches that both play their role as crutches and also allow me to build a solid and pleasant harmonic base for my improvisation.
IMPROVISING WITH A MODE: Using the mode’s key notes
- I suggest using 2 crutches that are both based on the same principle: using the key notes of the mode.
- The key notes of the mode are the notes that our ear absolutely needs to recognise the mode in which I want to sing.
- The key notes for each of the 6 modes are the same: 1; 3 (major or minor depending on the mode you’re in); 5; the pivot note.
- Why these notes?
1 because it is the home degree of our mode: it is the degree around which all the others are organised.
3 (major or minor) because it’s the directing degree: it’s the degree that determines whether I’m in a minor or major mode.
*This is a good opportunity to point this out: when we talk about a major mode, we refer to any mode with a degree of 3 major; when we talk about a minor mode, we refer to any mode with a degree of 3 minor.
The 5 because it’s the dominant degree: it’s the degree that recalls the 1. It’s magical: when our ears hear degree 5, they immediately want to sing degree 1 behind it.
The pivot note because it’s the degree that switches our ear to a single mode: 1, 3 (major or minor) and 5 are degrees that are shared by several modes; on the other hand, the pivot note is the degree that belongs only to that mode or that gives the mode its identity. In the table, these are the notes in red.
IMPROVING WITH A MODE: Crutch no. 1 = thread
- Crutch no. 1 requires a clear understanding of what a thread is.
- The principle: create a lead that necessarily, but not necessarily exclusively, contains the 4 key notes of the mode.
- Rule for the composition of the thread: degree 1 must be predominant = it must recur many times and be more present than the other degrees.
IMPROVISING WITH A MODE: Crutch n°2 = progression of 2 classical chords
- Crutch No. 1 requires a clear understanding of what a classical chord, a complex chord and a classical chord progression are.
- The principle: build a chord progression made up of 2 classical chords that necessarily, but not necessarily exclusively, contain the 4 key notes of the mode.
- Rule for composing a progression of 2 classical chords:
A) Depending on the mode you wish to improvise in, the progression is either: 1st degree chord + 2nd degree chord OR 1st degree chord + 7th degree chord.
Why these 2 chords? Because they’re the easiest to find by ear, and when you’re using a crutch you want to keep things as simple as possible!
B) The 1st degree chord must last longer than the 2nd chord.
Below is a visual of the progression to be used for each mode:

IMPROVISING WITH A MODE: Using the 2 crutches
- When you start improvising with modes, I recommend the following recipe for creating your improvisation: crutch n°1 + crutch n°2 + solo, counting the 7 degrees of the mode to check that it’s all right!
- As you progress, you can use just one of the two crutches and complete your arrangement in a completely intuitive way.
- After a while, you won’t need a crutch any more, just the ‘will’ to improvise in a particular mode will be enough to send your ear in the right direction!
Sources: multiple sources; Camille Pascal pedagogy with the table of 6 modes from the Mustradem training course and visually organised by Nicolas Mahnich (please comment if you know of other sources).